mercredi 28 janvier 2009



Avec patience et confiance, arrêter de courir

Laisser venir cette voix en moi qui appelle à se faire entendre
Donner espace à la vérité qui vit au fond de moi
Parvenir ainsi à la complétude.

Désormais, je m'appartiens.

Cela a pris du temps, bien des années et bien des lieux
J'ai été anéantie et bousculée
J'ai porté le visage d'autres personnes
Couru comme une folle
Comme si le Temps était là-bas
Terriblement vieux, criant pour m'avertir :
« Dépêche-toi ou tu seras morte avant... .
Avant quoi ? que le matin n'arrive ?
Que la fin du poème ne soit prononcée ?
Ou que l'amour ne soit, sauf dans un cœur fortifié?

A présent, rester immobile, être là
Sentir mon propre poids, ma propre densité
Désormais, j'ai le temps, et le Temps est jeune
Oh, dans cette heure unique je vis
Moi tout entière, et sans bouger
Moi qui, poursuivie, courais comme une folle
Immobile maintenant, immobile
J'arrête la course du soleil !

Poème inspiré...


lundi 26 janvier 2009



Tout est mouvement.
Tout se transforme en permanence.
Tout moment est le bon.

Le vivant nous enveloppe.






vendredi 23 janvier 2009

Marie de Hennezel - Connaître l'âme humaine

Marie de Hennezel est psychologue et psychothérapeute. Elle a travaillé dans une unité de soins palliatifs. Elle anime aujourd'hui des conférences et séminaires de formation à l'accompagnement de la fin de vie. Elle est auteure de plusieurs ouvrages. L'extrait qui suit parle de son métier et dans quelle dimension de l'Etre, elle l'inscrit.



Le psychologue est celui qui a «une connaissance de l'âme humaine». Celle-ci étant insondable, mystérieuse, infinie, la sagesse du psychologue est peut-être de savoir qu'il n'en fera jamais le tour. Renonçant à la connaître toute, il lui appartient néanmoins de lui accorder une attention infinie. Mais étudier l'âme, l'observer, ne suffit pas. Certains s'en contentent. Ce sont des entomologistes de la psyché, pas des psychologues. Ils se privent de l'essentiel : la rencontre avec l'autre, qui ne laisse jamais indemne. Car s'adresser à l'âme d'autrui, c'est frapper à une porte qui ouvre sur l'inconnu. On ne sait jamais comment on sortira de là.

Prendre le risque de l'âme, le risque de s'engager avec sa propre âme à la rencontre de celle d'autrui, c'est notre métier. Parler à l'âme d'autrui. Laisser parler cette âme, l'entendre, dialoguer avec elle, prendre soin d'elle. Voilà la mission du psychologue. Je préfère le mot âme au terme grec de psyché. Mais sans doute faut-il préciser que je ne l'emploie pas dans son sens religieux.

L'âme, c'est ce qu'il y a de plus profond, de plus intime, de plus mystérieux et secret chez l'être humain. C'est sa vie affective, sa subjectivité, ses sentiments, ses intuitions, sa pensée, sa sensibilité. Tout un monde intérieur de représentations, de mouvements, d'émotions, qui échappe à tout contrôle, à toute tentative d'appropriation. La liberté et la dignité intrinsèques de l'humain.

Comme le montrent les écrits et témoignages de ceux que, de tout temps, on a cherché à avilir, on peut blesser l'âme, l'opprimer, l'humilier, la torturer, mais on ne peut l'anéantir. Elle se protège derrière d'épaisses murailles, se rétracte au fond d'immenses souterrains, promène sa peine en quête d'apaisement et finalement continue à vivre dans l'invisible, même quand le corps est détruit.
C'est cette âme chantée par les poètes, explorée par les Grecs, puis par la psychanalyse à qui, je veux parler.

Mes amis se moquent parfois quand je leur demande : «Comment va ton âme?» que je préfère au «Comment vas-tu?», si banal. C'est ce qui m'intéresse chez l'autre. Cette profondeur sensible en lui, en elle, son «état d'âme», tellement plus passionnant que les aléas de sa santé ou ses états de service!

La psychologie a toujours été pour moi l'art de parler à l'âme. Écouter est essentiel pour éponger le trop plein d'angoisse, mais cela ne suffit pas. L'âme en souffrance aspire à prendre conscience d'elle-même, à sortir de sa prison si elle est enfermée, à identifier ce qui fait obstacle au désir, pour retrouver la joie de vivre, de chanter, de danser, à prendre la mesure de la grandeur à laquelle elle est appelée.

Car toute âme est invitée à vivre et à s'épanouir. Nous ne sommes pas seulement des «épongeurs d'angoisse» mais aussi des directeurs de conscience modernes. Non pas guidés par une morale religieuse, mais par le souci de permettre à ceux qui viennent vers nous en quête de sens, de trouver leurs propres réponses. J'ai appris très tôt qu'il y a la pointe visible de l'âme et sa profondeur invisible, ce que l'on perçoit d'elle à travers ses mouvements, les émotions, et puis tout cet inconnu de soi, ce réservoir inouï des possibles.

Qu'est-ce qu'être psychologue, sinon exercer cet art de soigner par la parole? Les mots que nous mettons sur les souffrances qui nous sont confiées, sont destinés à panser les blessures et plus encore à les éclairer.

Qu'est-ce qu'être psychologue, sinon ressentir et mettre en oeuvre cette passion pour l'humain, pour la manière dont chaque personne essaie, comme le dit si bien Christian Bobin, «d'extraire du chaos de sa vie un peu de lumière». Je demeure, après plus de trente ans de métier, toujours étonnée par la profondeur, la complexité de l'humain. Tant d'années passées à entendre le mal-être ont paradoxalement renforcé ma confiance pour les forces inouïes à l' œuvre dans les profondeurs de l'être, dans cet «au-delà» qui est un «au-dedans».

Je me passionne pour l'être humain. «Cette créature qui marche délicatement sur une corde raide», comme l'a dit un jour Aldous Huxley, «avec l'intelligence, la conscience et tout ce qui est spirituel à un bout de son balancier, et le corps et l'instinct et tout ce qui est inconscient, terrestre et mystérieux à l'autre bout.»

De quelle façon l'humain survit-il au désespoir d'être séparé de l'Un par sa naissance? De quelle façon tente t’il la difficile traversée de la vie, comble t’il le vide entre les grands rendez-vous de l'enfance, de la vieillesse et de la mort? Comment supporte-t-il de n'être pas tout sur cette terre? C'est ce que je veux savoir.


Marie de Hennezel - La sagesse d'un psychologue - Editions L'Oeil Neuf



lundi 19 janvier 2009

Jack Kornfield - La sagesse du coeur

Jack Kornfield est un enseignant de tradition bouddhiste qui a largement participé à la connaissance de la pratique de la méditation vipassana en Occident.

www. jackkornfield.org


L'accomplissement spirituel n'est pas le résultat d'une connaissance ésotérique particulière, de l'étude des grands textes ou des soutras ni de l'apprentissage systématique des grandes oeuvres religieuses. On ne le trouvera pas non plus dans le domaine du contrôle et du pouvoir. Il n'est pas attaché à un certain ordre des choses et il ne porte pas de jugement. On ne l'obtient pas par le contrôle, que ce soit d'une autre personne ou de soi-même. Il découle bien plutôt d'une abondante sagesse du cœur.

La sagesse du cœur peut être trouvée en toute circonstance, sur n'importe quelle planète, qu'elle soit ronde ou carrée. Elle ne provient pas d'un savoir, d'images de perfection ni de la comparaison ou du jugement mais du fait que l'on voit avec les yeux de la sagesse, le cœur plein d'une attention aimante, que l'on offre sa compassion à tout ce qui existe dans notre monde.
La sagesse du cœur est ici, maintenant, à tout moment. Elle a toujours été là, et il n'est jamais trop tard pour la trouver. La plénitude et la liberté que nous recherchons sont notre propre nature véritable, ce que nous sommes réellement. Toutes les fois qu'on entreprend une pratique spirituelle, qu'on lit un livre traitant de spiritualité ou qu'on réfléchit à ce que cela signifie de vivre une vie juste, on amorce le processus inévitable d'ouverture à cette vérité, la vérité même de la vie.

Jack Kornfield - Périls et promesses de la vie spirituelle - Editions La Table Ronde



lundi 12 janvier 2009



Le cœur régule.
C'est le soleil de l'Etre.
Il a le pouvoir de l'intelligence intuitive
qui entre en résonnance avec toute chose.



Roland Yuno Rech - Etre dans le monde sans être du monde

Roland Yuno Rech est maître zen. Il anime enseignements et sesshin. Il évoque dans ces extraits différents points de vue autour de la dimension de l'éveil.

zen-nice.org


La vie spirituelle ne commence pas au moment où on se serait, enfin, dégagé de tous les obstacles. Chaque moment de la vie quotidienne, au contraire, est une occasion de pratiquer et de s'éveiller. En ce sens les «phénomènes» sont même nécessaires ; on ne peut pas pratiquer sans eux! Dès qu'une personne avance sur le chemin spirituel, qu'elle transforme sa relation aux autres et au monde, alors le monde, lui aussi, se transforme et fait un pas en avant.

Je ne suis pas pour une vie qui ne serait que contemplative. L'engagement est nécessaire. Mais pour qu'il soit juste, pour que nos motivations soient claires, il doit être précédé d'une période de méditation. Pour moi, l'essence du zen est d'éclairer l'action par la contemplation et de nourrir, en retour, la contemplation par l'expérience issue de l'action. La méditation, telle qu'elle a été enseignée par le Bouddha, nous permet d'«être dans le monde sans être du monde», c'est-à-dire sans en être prisonnier, ou s'y perdre.

Et cela ne signifie pas, par exemple, être sans désirs, mais être détaché de la réalisation, ou non, de ses désirs. Cette liberté est pour moi source de bonheur, mais pas d'indifférence. Je souffre beaucoup moins de mes propres attachements, mais je souffre souvent de la souffrance des autres ; cela ne me laisse pas en paix. Avec le temps, je constate aussi que j'accepte de plus en plus mes propres faiblesses, ou imperfections, tout, comme celles des autres. C'est ce qu'on appelle, dans le zen, développer «l'esprit de la grand-mère », l'esprit de compassion et de bienveillance.

Si on ne se tourne pas vers Dieu, on tourne son regard vers l'intérieur, afin de trouver la transcendance en soi. On peut dire qu'il s'agit de trouver Dieu en soi, mais Dieu en tant que dimension qui nous habite et nous imprègne profondément, qui est l'essence même de notre existence, et qui en même temps nous dépasse, ne nous appartient pas. Ce que le Bouddha appelait le nirvâna n'est pas un lieu, ou un objet, ce n'est pas «quelque chose» ; c'est une transformation de la conscience. C'est l'extinction de l'illusion «égotique» et la réalisation de la non-naissance et de la non-mort. Dans cette conscience, on perçoit que soi et tout ce qui est apparemment non-soi n'est pas séparé et on en vient à harmoniser notre vie avec cette réalité.

L'être humain, pour se développer sainement, a besoin de se constituer une personnalité, de se différencier. Il a peur de se dissoudre dans ce que certains ont appelé «le sentiment océanique». C'est cette peur que les mystiques transgressent. Cela ne signifie pas qu'ils abandonnent leur différence, mais qu'ils la font coexister avec le sens de l'identité. Vous et moi sommes différents ; en même temps, nous partageons quelque chose en commun qui nous dépasse tous deux. Aussi n'est-ce pas l'ego qu'il faut abandonner, mais le dysfonctionnement qui consiste à s'identifier à cet ego.

Pour reprendre une image souvent utilisée dans le zen, lorsque le vent cesse de souffler, la surface de la mer s'apaise. On peut alors voir le fond. En même temps, la surface reflète de manière juste, authentique, l'ensemble de l'univers. La conscience devient comme un miroir à deux faces, l'une tournée vers l'intérieur l'autre vers l'extérieur, dans lequel on peut observer les choses aussi bien à leur niveau purement phénoménal qu'à leur niveau ultime... La combinaison de la concentration et de l'observation est vraiment spécifique du zen. L'observation entraîne forcément une adhésion à ce qui apparaît. Mais un miroir qui retiendrait quoi que ce soit à sa surface ne pourrait pas fonctionner longtemps. Alors, le retour à la concentration sur le corps permet de lâcher prise, de laisser passer. En zazen, on apprend à pratiquer simultanément concentration et observation, ou à faire des allers et retours très rapides de l'une à l'autre.

Enquête au cœur de l'être. Entretiens. Espaces Libres chez Albin Michel



vendredi 9 janvier 2009

Charles Genoud - La présence, expérience sans jugements

Charles Genoud conduit des retraites dans les traditions vipassana et tibétaines. L'extrait est tiré d'une retranscription d'un enseignement donné à Paris.

www.vimalakirti.org


Dans ma méditation, une expérience surgit. A cet instant, j’ai une certaine qualité de présence. Si j’ai envie de la modifier, de l’améliorer, car je ne la trouve pas suffisamment bonne, que se passe-t-il ?

Il se passe qu’il y a d’abord une expérience de présence, puis une conceptualisation et que je l’évalue en disant "médiocre". Cette évaluation n’a rien à voir avec l’expérience elle-même. L’expérience c’est l’expérience. Le jugement que je porte me fait déjà passer de l’expérience elle-même au concept ou image de l’expérience, estimée médiocre. Et maintenant, j’amène à la conscience une autre image, un autre concept, de quelque chose de mieux, que je vais essayer de promouvoir.

Cela signifie qu’en méditation, dès que nous sommes dans un processus de transformation, nous quittons le domaine de l’expérience pour passer à celui de l’imaginaire. Or, l’imaginaire n’a pas l’épaisseur, la densité de l’expérience réelle.
Vivre dans l’imaginaire pour évaluer chaque expérience, vouloir l’améliorer au moyen de l’idée d’une meilleure expérience, nous établit nécessairement dans une faible qualité de présence, nous laisse frustrés car la possibilité d’une expérience pleine, la possibilité de plénitude n’existe pas lorsqu’on vit à la surface des choses, comme dans l’évaluation et la transformation.

Elles nous font quitter le domaine de l’expérience pour passer dans l’imaginaire de l’expérience. Cette conceptualisation des expériences surgit très rapidement. Parfois, en méditation, il est possible que nous n’adhérions pas à ce processus quand la qualité de présence est suffisamment stable et claire.

Il se peut donc, dans ce cas, ou si le pouvoir de fascination de la conceptualisation a perdu de sa forme, que nous ne passions pas directement de l’expérience à sa conceptualisation. Alors nous restons dans une intimité beaucoup plus profonde avec nous-mêmes, avec notre vie.


Charles Genoud. Extrait d'un enseignement 2003




mercredi 7 janvier 2009



"Je croyais que la vie était
une ligne, une phrase, une ascension,
un dû, un héritage, une peine,
un grisé sans contraste, un rythme sans vibration,
une inaccessible perfection.

Je vois bien que je me suis perdue :
c'est un envol, une chute,
une offrande, la vision d'un puma,
la simplicité d’un regard en amour, une poésie ;
c’est la souplesse d’une main, la fluidité d’un moment plein,
la clarté inattendue d’un matin, une étincelle de conscience,
la confiance en ce qui est.

Qui suis-je pour courir tant de morts et tant d'enchantements ?

J'appelle sur nous la grâce, tous autant que nous sommes.
Dans sa vastitude et dans sa générosité,
qu'elle guérisse nos coeurs et les illumine.
Que nous puissions regarder le soleil,
et sans peur,
nous sentir vibrer de sa lumière."

Christiane, inspirée d'un texte anonyme

Que cette année 2009 soit ouverte à l'harmonie des liens,
à l'épanouissement de l'énergie de vie et d'amour

dans toutes nos cellules, et au delà ..
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