mercredi 14 mai 2008

Jean Klein - Qui nous sommes, profondément

Jean Klein est auteur et maitre spirituel français décédé en 1998. Son enseignement repose sur la sagesse orientale, approche directe de la "dimension non mentale de la vie". Il a laissé un important héritage spirituel auquel se référent deux de ses disciples, Eric Baret et Francis Lucille.
Dans ces 2 extraits, l'accent est mis sur l'approche corporelle et son écoute."Seule compte l'écoute, l'attention sans directive".

www.nondualité.free.fr


(…) Le matin, avant que le corps se réveille dans cette présence, le «Je suis» est là. Vous êtes un acteur derrière le masque, vous êtes un avec ce «Je suis». Faites connaissance d'abord avec votre corps sans vouloir construire un être idéal, sans stratégie. Ayez simplement une attitude accueillante, ouverte à ses réactions, ses résistances. En général, quand vous croyez connaître telle situation, tel état, vous connaissez uniquement vos blocages, si l'on peut dire, car en fait, vous ne les connaissez pas, vous avez seulement appris des mouvements très savants pour les fuir. Au moment où vous êtes ouvert, tranquille, n'empêchez pas les éléments «corps, sensations, pensées» de s'exprimer ; c'est déjà une distanciation très importante. Vous avez alors un avant-goût de cette autonomie, de cette indépendance, de ce que vous êtes profondément. (…)

(…) La personne que nous croyons être existe obligatoirement dans une situation, elle y est liée et ne peut vivre sans cela. Quand les situations ont perdu leur fraîcheur, leur attrait, le moi s'ennuie et cherche, parfois avec l'arsenal du passé, à créer d'autres espoirs, d'autres souvenirs. A certains moments, le passé et le futur - qui est en quelque sorte une projection du premier - perdent leur saveur. C'est ce que nous pouvons appeler ennui. Vous essayez alors de changer de religion, de pays, vous changez de mari, de femme, vous vous appropriez un nouveau système de pensée, etc., ce sont uniquement des fuites. Voyez-le. Une acceptation pleine lucide de vous-même, vous fait saisir le merveilleux contenu dans chaque instant de l'existence; cet ennui sera remplacé alors par une profonde sérénité la paix dans l'amour, la béatitude. Pour assumer un problème, la personne doit abdiquer totalement, sans quoi il reste toujours des résidus que le moi n'éliminera pas, mais si vous vous placez sciemment dans une position globale de laisser-faire, vous êtes ouvert à la toute-possibilité. Dès que votre regard est impersonnel, tous les éléments que vous aviez omis se joignent à l'image projetée par la mémoire qui alors se dissout. C'est dans cette espèce d'intuition, en un éclair, que l'on voit presque objectivement l'ensemble de la question qui se consume en perdant son objectivation. Nous pouvons le dire d'une autre manière : si vous dirigez votre corps d'une façon ou d'une autre, il a des réactions ; ce sont les tensions, les noeuds qui se manifestent. Si vous restez dans sa totalité, dans ses prolongations, le parfum, les vibrations qui vous entourent s'éveillent, la tension se résorbe dans ces énergies, les noeuds disparaissent et vous êtes un dans ce regard où l'image s'est dissoute. (…)

Jean Klein - A l'écoute de Soi - Editions "Les Deux Océans"


mardi 13 mai 2008

Serge Carfantan - Incarnation du corps

Serge Carfantan est docteur agrégé en philosophie et professeur en lycée. Il évoque dans cet extrait les différences de notions entre "l'image du corps" et "l'incarnation du corps.

www.sergecar.club.fr

(…) Mon corps n’est certainement pas une chose comme une autre, ce n’est pas un simple objet. L’esprit, pour autant qu’il fait l’expérience concrète et vivante de l’incarnation n’est pas non plus un pur sujet. Je ne suis pas un ange qui flotterait au-dessus du corps. Mon esprit s’éprouve lui-même comme sentant charnellement la présence de mon corps. Aussi peut-on dire que mon corps véritable n’est pas un objet, mais sujet-objet à la fois. Je peux regarder ma main comme une sorte de curiosité posée là sur la table, près du sucrier, avec ces appendices étranges que sont des doigts ! Je vois alors dans ma main un objet. De même, je me regarde dans la glace et je vois cette figure dont je peux ne pas très très fier, je vois ce corps. Je me dis que les autres me voient ainsi et aussi se pose le problème de savoir comment je vais gérer ce qui devient le problème de mon image du corps.
C’est l’image qui m’inquiette. Je peux avoir honte de mon corps, mais comme je suis identifié à lui, j’ai honte de moi, parce que cette image n’est pas celle que je souhaiterais donner de moi. Je peux l’idolâtrer et passer des heures devant la glace à m’admirer, avec l’idée que je peux attirer le regard et adorer mon image au point de tomber ainsi dans le narcissisme. Mais c’est encore l’image du corps. Ce n’est pas l’incarnation. Tout ce que je fais pour soigner l’apparence de mon corps relève encore de l’image du corps et tout particulièrement de l’image du corps devant autrui.

Mais ce n’est pas du tout cela l’incarnation. L’image de mon corps n’est pas l’expérience de mon corps. L’incarnation est ce qui me fait sentir ma main comme irriguée de sensibilité, tremblante de froid, rigide d’une douleur qui n’est pas encore résolue. Elle me fait sentir la chaleur répandue dans mon corps qui s’est réchauffé en marchant dans la montagne. L’incarnation tient d’avantage au soin que j’apporte à mon corps, qu’au souci de mon apparence.
Je sens mon corps. Je me sens dans mon corps. C’est par mon corps que je suis inscrit ici et maintenant, dans ce lieu de l’espace, à ce moment du temps. C’est à partir de mon corps que je situe les directions de l’espace : la droite, la gauche, le haut et le bas. C’est à partir de mon corps que je me situe dans le monde, que je distingue ce qui est extérieur de ce qui est intérieur. Ce sont les limites de mon incarnation que j’explore dans l’endurance, l’exercice physique. C’est dans mon corps que j’affronte le danger et la peur de la mort. C’est avec mon corps de chair que je rencontre des êtres humains de chair comme moi. C’est dans ce corps de chair que se rencontre le désir, ce sont les corps de chair qui s’unissent dans la sexualité. Il y a des moments où mon corps est gracile et léger, quand, joyeux et plein d’entrain, j’esquisse un pas de danse. Il y a des moments où mon corps est lourd, pesant, inerte.
Cela n’a pas de rapport avec cette représentation abstraite du corps objet dont on me parle le plus souvent. Voir dans le corps ce qu’il est, sujet-objet, et non pas un objet modifie du tout au tout notre appréhension du corps. Cela nous oblige à accorder une attention particulière à la conscience du corps, cela nous oblige à investir de l’intérieur notre corps, et non pas à le regarder de l’extérieur. Il y a un sens et un mystère de l’incarnation qui nous échappent complètement dans l’attitude naturelle. Nous avons tendance, en réaction au matérialisme ambiant, à penser que l’homme postmoderne idolâtre le corps, lui dresse des autels (des top-model-autel), et survalorise le corps. En réalité, la postmodernité survalorise l’image du corps, ce qui n’est pas du tout la mme chose. L’homme de la vigilance, l’homme post-moderne pressé par le temps, submergé de préoccupations et de soucis vit dans le harcèlement de ses pensées, il ne vit pas vraiment son incarnation et il n’y porte pas attention.
Il y a une expérience sensible, un territoire d’expérience et d’expérimentation dans l’incarnation. Cette conscience-là n’est pas celle qui plane ailleurs, dans la pensée. C’est la conscience qui se fait chair et muscles, la conscience qui s’éprouve elle même charnellement dans le milieu des sens, les pieds sur Terre, vivant dans un corps pleinement humain. Mon corps est le lieu de mon expérience humaine. Et cette expérience est permanente et en devenir tout à la fois, ce qu’elle requiert, c’est une Présence qui signifie s’immerger dans cette pleine subjectivité de l’incarnation dans le lieu même de l’instant. (…)

Serge Carfantan sur le site : Philosophie et spiritualité - Extrait de
"La conscience et le corps"



jeudi 8 mai 2008



Toujours commencer par ce questionnement :
qu'est ce qui pourrait être plus léger ?
plus doux ?
plus libre ?

Créer, explorer, sentir
de nouvelles façons de se mouvoir
d'être sans âge ....
Souplesse et fluidité pour chaque moment
de rencontre avec le vivant.




dimanche 4 mai 2008








(...) Cela signifie que désormais, il n'y a plus de partie rejetée.
Vous avez absorbé votre totalité, vous avez accepté toutes vos facettes.
Vous êtes devenu multidimensionnel.
Désormais la polarité n'est plus une contradiction.
Elle est devenue complémentaire.
La femme en vous aide l'homme qui est en vous,
l'homme qui est en vous aide la femme qui est en vous.
Ils sont tombés amoureux l'un de l'autre, le conflit a disparu.
Ils sont devenus un, ils sont mariés l'un à l'autre.
C'est cela le mariage spirituel,
et c'est seulement de ce mariage-là que vous naîtrez.
C'est seulement de cette rencontre intérieure des contradictions
que vous naîtrez.(...)

Osho - La voie de l'amour

Eric Baret - Eveil et humilité

Contacter la part "humble " de moi même est un "chantier" de tâtonnements important pour moi en ce moment. Cet extrait d'Eric Baret donne un point de vue situé plus en relation avec la prétention de beaucoup, d'accéder à l'éveil.

www.bhairava.ws

(...) Toutes les traditions ont parlé de l'humilité. L'éveil, c'est l'humilité, c'est arrêter de prétendre être ceci ou cela, arrêter de prétendre être auteur, arrêter de prétendre diriger sa vie, se rendre compte que le courant des choses est là et se donner à ce courant sans vouloir diriger.
Quand vous lisez Ib'n Ata Allâh al-Iskantari, Layman P'ang, ou la Ribhu Gita il y a ce même silence, cette même humilité qui ont présidé à l'expression. Mais il n'y a pas d'éveil personnel. Quand Eckhart finit son sermon, il dit toujours, d'une manière ou d'une autre : «Prions pour que cette vérité prenne corps en nous.» Il ne prétend jamais être dans la vérité.
Parce que cette notion d'éveil, telle qu'on la connaît en Amérique du Nord, en Occident, elle prend un sens beaucoup plus, je dirais, exubérant. Cela, c'est du commerce. Ce sont des gens qui cherchent des décorations, la Légion d'honneur. On sait très bien maintenant que la Légion d'honneur, cela ne vaut plus grand-chose.
... La Légion d'honneur de la spiritualité.
Oui! Alors, beaucoup de gens ont la Légion d'honneur. C'est facile d'acheter une femme jeune et jolie. C'est facile dans notre société de gagner beaucoup d'argent. Finalement, le dernier élément... on achète l'éveil. Ce n'est pas très cher.
Ou cela peut être très cher.
C'est une denrée comme une autre. L'éveil personnel, c'est un manque de compréhension.
L'éveil, c'est la réalisation qu'il n'y a personne qui peut s'éveiller. On est dans un moment de totale humilité. Dire « Je suis éveillé » est factice. Cela ne veut rien dire.
N'y a-t-il pas d'effets physiologiques qui accompagnent cette humilité qui nous viendrait soudainement? Et d'abord, y a-t-il soudaineté? C'est un autre cliché en ce qui concerne l'éveil ici. On se dit que c'est une chose qui nous vient soudainement et qui, en plus, s'accompagnerait de phénomènes lumineux et autres. Tout un cirque en fait...
Il y a des degrés de relativité de l'ignorance. C'est-à-dire que vous pouvez très bien constater une certaine forme de purification. Il y a cinq ans lorsqu'un homme vous quittait, vous étiez traumatisée pendant un bon moment. Le prochain homme qui vous quitte, vous êtes traumatisée pendant quinze jours, puis deux jours. Il y a dix ans quand vous vous retrouviez sans argent avec un loyer à payer, cela vous mettait dans des états pas possibles. Un jour, vous vous trouvez sans argent avec un loyer à payer et vous sortez dehors et regardez le ciel et vous êtes heureuse. Incontestablement, on peut percevoir une forme d'apaisement qui se fait dans ce que l'on appelle une démarche spirituelle. Vous pouvez voir à quel point, à une époque, votre corps était toujours en réaction, toujours tendu. Vous dormiez huit heures par nuit et vous vous réveilliez fatigué. Vous pouvez vous rendre compte qu'à une autre époque, vous dormez le tiers de ce temps et vous vous réveillez complètement disponible. Si on vous dit que vous êtes un homme imbécile, aucune région de votre corps n'est ébranlée par ce commentaire. On peut tout à fait se rendre compte de cela. C'est une constatation purement objective.
Au niveau de l'effet physiologique de l'éveil, mon maître a formulé qu'en effet, à la suite d'une compréhension totale, la transformation s'immisce dans toutes les cellules et qu'il y a une harmonisation corporelle et mentale. C'est seulement en Inde que l'on a porté l'attention là-dessus. Dans la tradition chrétienne, on n'a jamais mis l'accent sur cette extériorisation; dans le bouddhisme et dans l'Islam, très peu. Pour la bonne raison que cela n'a aucune importance. Lorsque quelqu'un est libre de lui-même, que dans son corps se fasse un certain rééquilibre, que son psychisme se transforme, cela ne le concerne pas parce qu'il n'y a plus de personne.
L'éveil est soudain alors que la transformation du corps, dans l'espace-temps, est progressive. On n'a même pas besoin d'en parler, dans le sens où la recherche de l'éveil n'est pas la recherche de ces expressions. En profondeur, elle est le pressentiment d'être libre. Cela n'a rien à voir avec un effet. On pourrait dire que c'est presque dommage qu'il y ait ces effets. Ce qui importe, c'est de se sentir libre.
C'est simplement le mental qui recherche sans cesse une aventure nouvelle ou la même aventure jamais réalisée, celle de rejoindre l'esprit alors que le corps existe toujours, d'aller du superficiel au profond. (...)

Interview par Claire Varin (en italique dans cette retranscription)