lundi 28 septembre 2009

Karlfried Graf Durckheim - Faire l'expérience libératrice de l'Etre



Pour ce qui est des grandes expériences je pars, une fois encore, des trois grandes détresses de la vie humaine, la peur de la mort, le désespoir vis-à-vis de l'absurde et la tristesse dans l'isolement.

L'homme confronté à ces situations limites se sent détruit, au bord de l'annihilation. Et c'est là, où l'homme en tant que moi existentiel ne peut plus accepter ce qu'il vit, qu'il a encore la chance de faire l'expérience libératrice de toute angoisse, l'expérience libératrice du désespoir et l'expérience libératrice de la tristesse! C'est là que l'homme, qui est bien plus que son moi existentiel, fait l'expérience de l'Être transcendant et immanent.

Comment arrive-t-il à cette expérience ? Paradoxalement, c’est en acceptant ce qu’en tant que moi existentiel il ne peut pas accepter. C'est en acceptant la mort, en acceptant l'absurde et en acceptant l'isolement qu'il peut faire l'expérience de ce qui est au-delà de son horizon existentiel.
Il fait au moment même l’expérience d’une force dans la faiblesse, d’un sens dans le non sens et d’un amour dans l’isolement.

Je n'invente rien, j'écoute avec étonnement des hommes et des femmes qui me parlent de leur expérience, laquelle ne peut être comprise que comme la manifestation d'une réalité transcendante. Cette réalité transcendante n'est plus ici le contenu d'une croyance mais le contenu d'une expérience.


Karlfried Graf Durckheim - Le Centre de l'Etre - Editions Albin Michel


samedi 26 septembre 2009


".... Il mourut avant elle et c'est sans importance ;
l'amour ayant dès sa venue,
dès son premier frémissement,
aboli les vieux décrets du temps,
supprimé ces distinctions de l'avant et de l'après ;
ayant seulement maintenu l'aujourd'hui éternel des vivants,
l'aujourd'hui amoureux de l'amour."


Christian Bobin


mardi 22 septembre 2009

Arnaud Desjardins - Notre état naturel heureux



« Qu'est-ce que je veux ? C'est être heureux. (…) Est-ce qu'il n'y a pas à regarder plus profondément ? Et là, vous ferez une découverte : c'est qu'en fait, votre état fondamental – que vous connaissez encore bien peu - est complètement heureux par lui-même. (…)
Vous avez l'impression que ce que vous cherchez, le bonheur, est dans les objets, les accomplissements, quels qu’ils soient. Quand je dis les objets, ce n'est pas seulement un autre humain dans la relation amou­reuse ou sexuelle, ni une voiture ou un manteau de fourrure. Ce qui se passe, c'est qu'au moment où un désir est accompli, une certaine tension lâche et vous mène à votre état naturel heureux. Et ça, peu à peu, vous le découvrez : c'est une illusion de croire que le bonheur auquel vous aspirez est dans les objets. Il est en vous-même. Le désir vous met en exile et, au moment où ce désir est accompli, vous êtes en contact avec cette plénitude intime, la vraie joie de vivre.

Votre vraie nature essentielle n'est pas du tout frustrée : elle est plénitude, complètement heureuse. Mais les désirs vous font croire que vous en êtes coupé. L'accomplissement du désir vous remet en contact pendant un instant avec cet état heureux natu­rel par ce qu’il y a une détente - et puis apparaît de nouveau un désir ou une crainte qui vous donne l’impression d’un manque. »

Arnaud Desjardins - Retour à l'essentiel - Editions Poche


vendredi 18 septembre 2009


the path par ~ Teresa

Rien n'est éloigné de nos songes,
rien n'est trop fort à nos désirs,
rien ne peut faire que l'on renonce
à ce qu'il y a d'absolu sous nos pas.


André Velter



mardi 15 septembre 2009

Jean Marc Mantel - Plaisir et joie : une dépendance ?



Pourquoi un état devient-il attachant ? Parce qu'il est assimilé à une expérience de plaisir.
Le plaisir est une sensation particulière. On pourrait la nommer vibration, tant elle transporte les sens dans un royaume qui lui est propre. Selon le lieu où cette vibration est ressentie, l'objet de plaisir se transforme.
Examinons sa relation à la joie. Ils diffèrent tous deux tout d'abord quant à la durée. Le plaisir, même prolongé, est limité dans le temps. La joie peut durer… toute l'éternité. Le plaisir est limité dans sa localisation. La joie ne peut être localisée. Le plaisir requiert un "objet" pour s'éveiller. La joie ne requiert que la joie pour se révéler.
Le plaisir peut être donc vu comme une fenêtre ouverte vers la joie, prémisse d'une permanence qui se cherche. Qui n'a donc pas désiré que le plaisir ne cesse jamais ? Or, aussitôt né, il cherche déjà à s'en aller, nous laissant à nouveau tout seul, dans une solitude abhorrée.
L'attachement au plaisir, qui est au cœur de la dépendance, ne serait-il qu'un attachement à la joie, ainsi déguisée ? Le plaisir viendrait-il éveiller nos sens pour nous révéler la joie par lui masquée ?

On voit ainsi que transparaît, derrière l'expérience de la dépendance, une expérience plus fondamentale, celle de l'être. La division entre un sujet dépendant et un objet de dépendance peut-elle être abolie ? N'est-ce pas le propre de l'amour que de faire fusionner le sujet amoureux et son objet d'amour ? Je deviens ce que je désire. Je deviens donc ce plaisir que je désire. Je me perds en l'objet de mon propre désir. Je suis ce que je désire. Divine ivresse dans laquelle se perd le "je".

D'où peut-on contempler la division si ce n'est de l'indivision ? Si nous n'étions pas un, comment pourrions-nous connaître le deux ? La quête de l'un ne passe-t-elle pas par la vision du deux ?
Nous voici donc au point-même où nous nous trouvons, là où nous sommes dans cet instant. Ici-même, sans distance, un !
De l'objet de dépendance au sujet dépendant, il n'y aurait donc aucune distance. "Je" est le pont entre le sujet et l'objet. "Je" est ce vers quoi tendent à la fois l'objet et le sujet. "Je" est un, malgré ses apparences multiples. "Je" est ce que je désire, bien que les objets apparents du désir soient infinis.

Explorer la dépendance signifie donc s'explorer soi-même. Explorer le moi, dans toutes ses facettes, et se retourner vers le connaisseur du moi, celui qui se sait sans pouvoir se nommer.
Laissons donc au sans-nom la primeur de cette enquête, qui nous a conduits depuis les affres du plaisir jusqu'au contentement de la joie. C'est ainsi la joie qui se cherche derrière tous les désirs et plaisirs. Rendons hommage à l'objet suprême de la dépendance, la joie qui ne se laisse jamais saisir, mais qui peut nous saisir, qui se reflète dans les miroirs du corps et de l'esprit sans pour autant leur appartenir, qui n'a de cesse tant qu'elle ne nous a pas complètement absorbés, qui est quand je ne suis pas. Elle se réjouit de mon absence, et s'épanouit dans ma présence. Hommage à elle, source de toute dépendance et libre de toute dépendance.


Jean Marc Mantel - Le plaisir et la joie, hymne à l'impérissable (texte écrit à l'attention d'un ouvrage collectif)



jeudi 10 septembre 2009

Notre royauté intérieure



Au cœur de nous-mêmes se fonde une royauté. Celle de notre être souverain du vivant.

Notre roi intérieur nous invite à remonter à la racine de nos désirs et à identifier quelle qualité d’être, en nous, aurait intérêt à un accomplissement.
Ainsi nous découvrons, derrière nos innombrables fantasmes et désirs imaginaires, un désir infini, direct et essentiel qui, répondant à une prédisposition, cherchera dans l’accomplissement, à exprimer cette qualité.

La vie trouve dans le cœur du « héros intérieur » le désir, et dans l’intelligence du « roi intérieur » l’intention, pour faire germer en nous cette qualité qui demande à éclore.
Pour donner une réalisation à nos désirs, la vie nous demande de faire du déploiement de cette qualité un besoin vital. C’est alors que nous profiterons de la magie de la vie. Sans doute aussi pourrons nous con-sacrer notre énergie, dont celle de l’amour à la plénitude et à la vastitude.

Inspiré d'un extrait de lecture sur internet


mardi 8 septembre 2009



141|365 ||| under the waves par .bella.



Risquer la vie ; risquer de laisser venir la vie.
Toute modification est celle de la vie,
du vivant qui entre dans la variabilité.


Je ne cherche pas à sentir que je suis vivant.
Cela arrive quand j'adhère à ma forme de vie,
c'est à dire à toutes les circonstances de mon état d'être vivant.

Il faut trouver sans chercher.
C'est là qu'il faut arriver.

Le chemin est celui d'une recherche qui aboutit à l'impasse.
Lorsque l'on a désespéré de trouver,
la recherche s'arrête dans le désespoir

et c'est ce moment de désespérance qui permet l'illumination.
On trouve sans avoir plus à chercher
et parce que l'on a plus à chercher.


François Roustang


vendredi 4 septembre 2009

Christiane Singer - Entre le cœur du monde et le mien, tout coule de source



L'état amoureux donne un goût de l’élan ; cet élan qui porte, jette l’être entier en avant vers les bras de l'aimé(e).


J'ose prétendre que si en cet instant, en de multiples endroits du monde, des femmes ne s'élançaient pas vers leurs aimés, des enfants dans les bras d'une mère, d'un père, des amis l'un vers l'autre, des chevreuils vers la source, si cet élan n'était pas à chaque instant tissé de neuf qui jette l'océan à la rencontre de la terre, alors le monde cesserait aussitôt d'exister. Car cet élan est le nerf de la création.

Lève-toi! Marche! Debout! « Mais je suis déjà debout! - Non, mets-toi encore debout dans ce que tu crois être debout! Ouvre les yeux ! - Mais j’ai déjà les yeux ouverts ! - Ouvre les yeux dans les yeux que tu crois avoir ouverts ... » De commencement en commencement jusqu'au commencement qui n'a pas de fin. Un moment, la peur est abrogée, la peur que nous ressentons tous à nous élancer, à nous perdre dans l'amour, à nous anéantir dans un autre. Et pourtant c'est cette expérience - qui dans l'ordre de la logique nous éloigne au maximum de ce que nous sommes - qui nous précipite au cœur de notre être véritable. En me diluant, en me perdant, je me rencontre pour la première fois. Là où je suis le plus loin de ce que je croyais être moi, je suis enfin qui je suis.

Et même si nos amours souvent se terminent en abandon, en trahison, ne prononçons pas de faux serments : «Désormais je n'aimerai plus». Mais tout au contraire, jurons-nous de ne plus jamais aimer avec l'arrière-pensée de garder et de posséder, de ne plus jamais aimer autrement que pour aimer. Sommes-nous des mercenaires pour attendre en retour une solde ?

Aimer est en soi la récompense. Chaque fois que nous aimons, le monde resplendit et jubile. Chaque nœud de bois, chaque pavé sous mon pied, chaque poignée de porte sont des talismans de l'amour! Le monde entier devient un talisman. Je ne suis plus qu'élan, rencontre, reliance. Je suis vivant! Je rayonne de ce qui est, je reflète la splendeur du monde ; entre le cœur du monde et le mien, tout coule de source.

Christiane Singer - Du bon usage des crises - Editions Albin Michel


mardi 1 septembre 2009


Toute réalité est immédiate.

La fraîcheur absolue de chaque instant coule
et le corps infini du yogin et de la yogini,
non entravé par la mémoire et la projection
réagit dans l’instant, spontanément,
connaît dans l’instant, oublie dans l’instant
car la plénitude ne laisse aucune scorie sur le rubis du Cœur.

Daniel Odier