mercredi 28 octobre 2009

Dans l'espace entre les pensées,
la sagesse non conceptuelle
brille continuellement.

Milarepa


samedi 24 octobre 2009

John Welwood - Notre manière d'être avec notre expérience



À ce point, tout ce qui est expérimenté dans la vie quotidienne à travers la perception sensorielle est une expérience nue, car elle est directe. Il n’y a pas de voile entre «nous» et «ça». Le Tantra n’apprend pas à réprimer ni à détruire une énergie mais à la transmuter ; en d'autres termes, à s'accorder avec la forme d'énergie ... Quand «nous» allons de pair avec l'énergie, l'expérience devient alors très créative ... Nous réalisons que nous n’avons plus à abandonner quoi que ce soit. Nous commençons à voir les qualités de sagesse, sous-jacentes à la situation de notre vie... Si nous sommes très impliqué dans une émotion comme la colère, alors, en ayant une vision soudaine, momentanée, d'ouverture ... Nous commençons à voir que nous n’avons pas à refouler notre énergie ... mais que nous pouvons transformer notre agressivité en énergie dynamique ... Si nous sentons réellement la qualité vivante, la texture des émotions telles qu'elles sont dans leur nudité, cette expérience contient alors la vérité ultime ... Nous découvrons que l'émotion en fait n’existe pas telle qu'elle apparaît mais qu'elle contient beaucoup de sagesse et d'espace ouvert ... Le processus de ... transmutation des émotions se met ensuite en place automatiquement.


Nous ressentons un bouleversement émotionnel tel qu'il est, mais ... devenons un avec lui... Soyons dans l'émotion, traversons la, abandonnons-nous à elle, faisons-en l'expérience. Nous commençons à aller vers l'émotion, au lieu de simplement ressentir l'émotion venir vers nous ... Les énergies les plus puissantes deviennent alors parfaitement utilisables ... Tout ce qui advient dans l'esprit est considéré comme le chemin ; tout est utilisable. C'est une proclamation intrépide … C’est le rugissement du lion.

Le piège spirituel subtil du travail psychologique est qu'il peut renforcer certaines tendances inhérentes à la personnalité conditionnée : se voir comme un actif, toujours rechercher le sens dans l'expérience ou faire continuellement des efforts pour «quelque chose de mieux». Bien que la réflexion psychologique puisse certainement aider les gens à progresser de manière importante, à un certain stade, même le plus petit désir de changement ou d'amélioration peut interférer avec la détente et le lâcher-prise plus profonds qui sont nécessaires pour passer du domaine de la personnalité à celui de l'être, que l'on ne peut découvrir que dans et à travers l'instantanéité présente - dans les moments où cessent toute conceptualisation et tout effort.

Quand nous laissons l'expérience être telle qu'elle est, au lieu de chercher à l'altérer d'une façon quelconque, le centre d'intérêt du travail intérieur se déplace de manière importante et forte. Notre expérience n'est plus quelque chose de séparé de nous, que nous avons besoin de transformer ou de résoudre ; au lieu de cela, le centre d'intérêt s'élargit au champ plus vaste : notre-manière-d'être-avec-notre-expérience. Et quand nous nous relions de façon plus spacieuse et ouverte à notre expérience, celle-ci devient moins problématique car nous ne vivons plus dans une tension je/elle, sujet/objet, vis-à-vis de cette expérience.

Bien que le but principal de la psychothérapie soit de réduire la détresse psychologique et d'accroître la compréhension de soi plutôt que de dépasser la conscience divisée, nous pouvons ressentir malgré tout un besoin de pratiquer une thérapie plus en accord avec la qualité de non-agir de la présence méditative. En étant inspiré en ce sens par des moments au cours desquels nous nous ouvrons à notre expérience simplement telle qu'elle est, nous amène à un sens de présence plus complet - une forme «d'être sans programme» conduisant à un puissant sentiment de calme, d'acceptation et de vie. De tels moments offrent un aperçu de ce qui demeure de l'autre côté de la conscience divisée : être un avec soi-même d'une façon nouvelle, plus profonde.

Il y a, bien sûr, un temps pour essayer activement de pénétrer les voiles de l'expérience, tout comme il y a un temps pour permettre à l'expérience d'être telle qu'elle est. Si nous sommes incapables ou peu enclins à nous occuper activement des problèmes de notre vie personnelle, laisser être peut alors devenir une attitude de dérobade et une impasse. Toutefois, si nous sommes incapables de laisser notre expérience être, ou de nous y ouvrir simplement telle qu'elle est, notre travail psychologique risque alors de renforcer la tendance habituelle de la personnalité conditionnée consistant à nous détourner de l'instant présent.


John Welwood - Psychologie de l'Eveil - Editions La Table Ronde



mardi 20 octobre 2009

Andrew Cohen - L'abandon, au delà de la stratégie


L'abandon nous conduit, au-delà de ce que nous pouvons comprendre, directement à ce que nous pouvons connaître, mais jamais comprendre. L'abandon passe par l'expérience. Au delà de la compréhension signifie au-delà du mental, au-delà de l'ego, au-delà de toute référence.

La reconnaissance, la réalisation et l'acceptation de cela qui est au-delà de la compréhension constitue l'abandon. L'abandon rend nul et non avenue toute stratégie que le mental peut vous suggérer pour nous mener au-delà de lui-même.

Aucune stratégie ne peut atteindre ce qui est au delà du mental, hormis celle de renoncer à toutes les stratégies quelles qu'elles soient. Voilà en quoi consiste l'abandon. Cela même qui est à jamais au-delà du mental et de l'ego représente toujours le défi ultime pour le mental et l'ego. Voilà pourquoi l'abandon est le défi ultime. C'est dans la perspective de ce défi que l'ensemble de ce qui se joue sur la scène de l'existence devient profond et fascinant.


Andrew Cohen



samedi 17 octobre 2009




Dans le pré en friche, des petites fleurs dont la blancheur de craie ferait paraître sale la neige la plus fraîche. Elles sont disséminées par groupe de dix ou douze dans les hautes herbes - des communiantes qui auraient échappé à l'église et au banquet, une école buissonnière céleste.
De retour dans le bureau, j'écoute "L'Art de la fugue" de Bach, au clavecin - le même air depuis des semaines.

Il suffit de toujours admirer la même chose, insignifiante comme une petite fleur de feu blanc ou vite évanouie comme une ritournelle de Bach au clavecin - et dans cette attention, par cette gracieuse monotonie : l'univers descend dans l'âme et s'y tient comme dans une boîte d'allumettes avec toutes ses étoiles, ses lunes et ses muettes innocences.

Christian Bobin


jeudi 15 octobre 2009

Denise Desjardins - Que peut le oui ?


Que peut le oui ? Rien, s'il est passivité, résignation, répression du non, accablement. Tout, s'il est processus dynamique, vision juste. Tenter
d'accueillir l'émotion, de rester quelque temps en sa compagnie ; la voir sans la nier, la reconnaître sans la juger, bien sûr, c'est lui dire oui. Bien sûr, c'est être « un » avec elle.

Au lieu de me diviser en la refusant, la refoulant, je l'accompagne. Unifié, je colle toujours au principe de non-dualité. Même si je suis perturbé, en acceptant de l’être, je retrouve mon unité et suis de nouveau en accord avec la vérité non-duelle. Je laisse «l'Enfer» du conflit et regagne mon «Paradis» de tranquillité. Mais - nuance - non d'indifférence qui est le résultat d'un refoulement déguisé en simili d'acceptation, un oui du bout des lèvres. Un refus masqué, en somme.

L'indifférence, ou une excessive politesse, camouflent l'émotion en la réprimant. Masques derrière lesquels nous nous figeons pour nous couper de l'émotionnel, sans le résoudre ni le transmuer. Si la non-dualité est un principe vrai, il se retrouve partout, également dans nos processus psychiques. C'est précisément pourquoi dès qu'apparaît, dans notre monde intérieur, la moindre division ou la plus mince hésitation, il en résulte une gêne obscure nous servant de signal : "Attention - Déviation". Nous ne sommes plus dans la vérité.!
Rétablir l'aise, renouer avec le «Paradis», c'est se sentir à nouveau unifié, même avec ses bourrasques intimes.

Ce qui nécessite quelque peu de vigilance. Emotion plus vigilance égale flot d'énergie plus vigilance. Résultat : éveil intérieur. Une équation forte parce que nourrie de vérité. Si j'y parviens ... Il n'est guère facile de vivre simultanément sur ces deux niveaux, d'assembler ces deux pôles contraires : trouble dynamique et lueur de lucidité ; ou tout au moins d'établir un pont intermittent, un va-et-vient entre les deux. Voilà une liberté intérieure dont le moins qu'on puisse dire est qu'elle sort du troupeau de nos habitudes mentales.

Calme ou tendu, heureux ou perturbé, beaucoup de circonvolutions avant de parvenir, en toutes circonstances, à garder un point fixe - comme le derviche tourneur maintient en lui, même au plus fort du tourbillon un axe d'immobilité tranquille.


Denise Desjardins - La stratégie du Oui - Editions Pocket


jeudi 8 octobre 2009

Quelque part,
se tenir
précisément
tendrement
immobile...
Epousant
les courbes
de l'invisible infini fiancé.

Etre dansé par le Souffle,
Inspiré par le Vent.

Le fond de l'Etre est doux...


Jean Yves Leloup


mardi 6 octobre 2009


Qu'y a t'il a attendre de l'autre,
quand tout est déjà déposé en soi et ne demande qu'à fructifier ?
C'est parce que notre profondeur les appelle
que les rencontres se font.
Nous les disons providentielles
mais ce n'est que la loi de l'âme
que de permettre à la personne de grandir
à travers retrouvailles et éloignements.

Tout est absolument juste et à sa place.

Tout autant, l'autre est nécessaire à notre construction.
Nous ne pouvons bâtir notre singularité sans lui.
Notre originalité a besoin de lui pour s'épanouir.
Quel qu'il soit, il est notre miroir.
Il est le révélateur de ce que nous avons choisi de vivre
de ce que nous avons peur de vivre.
Il est le révélateur de ce à quoi nous aspirons,
de ce à quoi nous renonçons, nous nous résignons.
Il révèle Celui ou Celle que nous sommes.

La relation amoureuse est l'espace privilégié
dans lequel se dévoile notre nature sacrée.
La relation amoureuse danse et célèbre la vie ;
elle voit croitre tout, tout le Meilleur de Nous.



Inspiré d'un texte lu sur internet


samedi 3 octobre 2009



Diamant par mmarsupilami

Karlfried Graf Durckheim - L'expérience au delà du concept ...


Sur le plan de l'expérience, le mot essentiel indique quelque chose qui nous touche dans une profondeur. Peut-être même pourrait-on dire que cette qualité touche un autre nous-mêmes, dans le sens où, dans cette expérience, nous ne sommes plus le même, nous sommes autre.

Il nous faut aussi parler de nous-mêmes en tant qu'Etre essentiel. On pourrait dire qu'existe l'homme en tant qu'être conditionné par les conditions de son existence et les circonstances. Et existe l'homme en tant qu'être non conditionné. Et c'est là qu'il manifeste l'Être, avec un grand E, qui cherche à se réaliser dans l'homme à travers ce que j'appelle son Être essentiel.

Il faut bien parler d'un Etre essentiel en nous-mêmes, ce n'est pas l'essence. C'est un toi, c'est quelque chose qui nous appelle, qui nous touche et vis-à-vis duquel on sent une responsabilité. C'est dans la mesure où nous pourrons nous ouvrir à l'Être essentiel présent en nous-mêmes que nous pourrons goûter dans tout ce qui nous entoure cette autre dimension qui dépasse ce que nous entendons par réalité existentielle

Le mot essentiel représente pour moi autre chose que l'essence de toutes choses. L'essence c'est un terme philosophique. Le mot essentiel, pour moi, indique une expérience.

La philosophie occidentale a depuis toujours fait de son mieux pour transformer les expériences de l'homme en concepts. Jusqu'à Descartes pour lequel à la fin le mot réel, ou réalité, peut être donné à ce qui entre dans un ordre de concepts bien définis. Ce qui n'entre pas dans cet ordre n'a pas de réalité. Nous devons aujourd'hui reconnaître qu'il y a des expériences pour lesquelles on n'a pas de concept. Et les concepts les plus clairs sont les plus éloignés des expériences les plus profondes. Ainsi le mot Etre, qui est pour ainsi dire le sommet de la pyramide des concepts, est le concept le plus abstrait au monde. Mais si la pyramide a sa pointe dirigée vers le bas, le mot Etre indique la chose la plus concrète en tant qu’expérience.

Et voilà la différence entre la philosophie occidentale et la sagesse orientale. La sagesse orientale se sert des mots pour indiquer des expériences qu'on ne peut pas définir. Tandis que tout l'effort des philosophes occidentaux était de bien établir un ordre de concepts qui explique et fixe des expériences. Mais, ce faisant on enlève à celles-ci leur force créatrice qui conduit à la transformation de l'homme.

Il faut dire que vis-à-vis de l'essentiel il est des gens qui sont sourds et aveugles malgré toute leur intelligence. Un être intelligent n'est pas nécessairement spirituel. Et il est des gens d'une grande simplicité intellectuelle qui ont le goût pour la qualité numineuse de l'essentiel. Ce sont ces derniers qui peuvent se rendre compte que l'expérience qu'ils ont vécue représente une chance pour leur existence. Ils peuvent alors cultiver le champ de leur existence pour y retrouver l'essentiel qui s'est manifesté à eux le temps d'une expérience. Ce travail commence avec le développement de l'organe du goût de l'essentiel, le corps que nous sommes.

Karlfried Graf Durckheim - Le centre de l'Etre - Editions Albin Michel