L'esprit n'est pas abstrait, pas intellectuel non plus. Il est intelligence et pénétration. Il fait la lumière sur tout ce qui existe. Mais il y a davantage en lui. Il est aussi énergie. C'est elle qui incite à penser et à agir. Ce qui est une autre façon d'être lumineux. Dans une situation qui paraît une impasse, ayons l'idée d'avoir une idée et d'agir, le cours des choses se transforme. Cette idée donne le courage de vivre, avant de donner des idées et des réponses.
Il existe deux lumières au sein de l'esprit.
L'une est la lumière de la foi, l'autre la lumière de l'intelligence. Si la seconde est la pleine manifestation de l'esprit, révélant toutes choses et tout être, la première est la source de tout esprit, sous la forme de l'énergie nécessaire à toute intelligence. Ces deux lumières sont inséparables l'une de l'autre. Grâce à leur concours réciproque, l'esprit est véritablement infini. Car la symbolique de la double face signifie que rien n'est unilatéral. Rien n'est refermé sur lui-même. Et l'expérience le prouve abondamment.
Qu'une intelligence cesse d'être soutenue par une foi, celle-ci n'est plus lumineuse, mais triste, capable d'analyser le monde, mais non de le transformer afin de le faire vivre pour aller de l'avant. Qu'une foi, à l'inverse, cesse de se manifester dans une intelligence, celle-ci n'est bientôt plus qu'un élan vidé de substance.
On critique l'intelligence desséchée. Et l'on a raison. On critique la foi aveugle. Et l'on a également raison. Car une authentique culture de l'esprit a besoin des deux. De l'intelligence, afin que la foi devienne lumineuse. Mais aussi de la foi, afin que l'intelligence devienne vivifiante. Il importe donc de lui rendre la place qui lui revient.
Bertrand Vergely - La foi ou la nostalgie de l'admirable - Editions Albin Michel