Ce qui nous met vraiment dans la résonance de l'autre, ne nous lassons pas de le répéter, c'est l'amour. L'amour ne rend pas aveugle, il rend visionnaire, il met directement en contact avec l'être réalisé qui habite cette personne que j'ai choisie, cet amant ou amante, choisi entre tous ceux et celles que j'ai rencontrés. L'amour essuie la pruine du fruit, dissout la brume et fait voir, derrière les apparences, la perfection du projet divin que chacun de nous incarne sans le savoir.
En somme, cette percée directe, à travers les apparences, ce que l'amour me permet de voir, c'est l'accomplissement de ce qui est en devenir, une sorte d'avance, sans versement d'intérêts, une sorte d'acompte sur héritage de lumière de celui que j'aime.
La rencontre d'un maître dans les traditions les plus diverses est de cette nature, avec la différence qu'il n'y a plus d'acompte nécessaire et que le maître a déjà reçu en partage cet héritage de lumière ; il a atteint sa transparence, là où il se tient, il n'y a plus personne sinon un accroc à travers lequel je peux voir derrière les apparences le déploiement du Réel.
Derrière la Maya, l'être aimé, vénéré ; comme l'accroc dans le rideau, je vois au travers, dans le frémissement infini du crée, dans cet univers indifférencié de l'au-delà.
Christiane Singer - Où cours tu ? Ne sais tu pas que le ciel est en toi ? - Editions Albin Michel