dimanche 3 février 2008

Swami Prajnanpad ; La connaissance ...

Swami Prajnanpad est un maitre indien. Arnaud Desjardin est l'un de ses diciples les plus connus. Dans son enseignement, il fait des liens interressants avec la psychanalyse. Et c'est dans cette rencontre des deux états d'esprit (traditionnel de l'advaita et psychanalyse) que nous pouvons trouver une nouvelle source de réponses et de guidance. Ces trois extraits donnent une place première à cette démarche essentielle de la connaissance.


Seule la connaissance libère :

La recherche spirituelle ne consiste donc pas à essayer de trouver ce qui est au-delà de notre perception, mais à regarder ce qui est là, présent devant nous et qui forme notre réalité. Il n’y a pas d’autre réalité pour nous que celle qui est la nôtre maintenant. (…) L’étude des faits, de la réalité devait occuper la première place dans la but de " voir ce qui est ".
L’homme vit dans l’illusion, il ne voit pas les choses comme elles sont. Il est aveuglé, poussé par des forces dont il n’est pas conscient et qui dirigent sa vie.
Ces forces sont ses propres émotions qui sont conditionnées par le passé. Se rendre libre du passé, c’est se libérer de l’illusion. On reconnaît, exprimé d’une autre manière, ce qu’affirment les textes indiens : se rendre libre du karma (actions passées) c’est déchirer le voile de la mâyâ (illusion). Tel est le chemin de la délivrance.
(…)

Connaître c’est être :

Il s’agit ici d’une connaissance opérationnelle qui a pour but de conduire à la libération de la souffrance. Cette connaissance n’est pas, bien entendu, purement intellectuelle : celle où l’on sait quelque chose tandis que dans le même temps on sent autre chose ou encore on agit autrement. C’est une connaissance où la tête (intellect), le cœur (sentiment) et le corps (action délibérée et consciente) sont unifiés. Quand l’intellect fonctionne tout seul, sans aucun appui sur la réalité ou les faits, cela devient de l’intellectualisme, activité mentale où règnent représentations et imaginations qui entraînent dans leur sillage émotions et actions impulsives.
Les faits sont là, la vérité est là, mais elle est refusée. Elle frappe à la porte, mais elle est refoulée, ce qui provoque malaise ou mal-être.
Le malaise est important parce qu’il est le signe que la vérité ou les faits ne sont pas vus tels qu’ils sont. Quelque chose bloque la vision. Pour la débloquer, il s’agit d’exprimer le malaise : quel est-il ? De quoi est-il fait ? L’expression implique la détente : laisser sortir ce qui vient, permettre au ressenti de s’exprimer, ce qui implique qu’aucun jugement de valeur ne vient empêcher l’expression libre.
(…)

Quelle est la cause de l’émotion ? Une idée fausse : la réalité est différente de ce que l’on souhaiterait qu’elle soit. L’autre est différent. Chaque fois que l’on prend l’autre pour ce qu’il n’est pas, on s’expose à recevoir des coups.
La souffrance de chacun lui est personnelle, les circonstances qui lui ont donné naissance sont personnelles, les images qui viennent à notre conscience sont celles de notre propre passé. Pourtant cette souffrance si personnelle nous livre la clé d’une vérité générale : chacun est différent, la source de tout malaise, de toute souffrance est la non-perception de cette différence. Il n’y en a pas d’autre. D’où cette formule lapidaire : voir la différence, c’est voir l’autre tel qu’il est et, à partir de là, pouvoir être un avec lui. C’est la définition même de l’amour. On parle de l’Amour avec un grand A ce qui a pour effet de le mettre sur un piédestal et de l’éloigner dans un univers inaccessible dont l’accès ne nous est pas indiqué. Ici on ne parle pas d’amour mais de différence. Voir la différence est la porte d’accès à l’amour.

La connaissance vient de l’expérience :

Voir la différence, voir la réalité telle qu’elle est c’est cela la vérité. Et seule la vérité donne une assise stable. Mais pour voir la différence il faut abandonner le confort douillet de ses préjugés, de ses croyances, de ses habitudes de pensées. Aussi s’agit-il d’un processus de longue haleine dont la durée est déterminée par la quantité d’inconfort que l’on est capable ou prêt à supporter.
La vie se charge de nous déloger des niches que nous nous abritons car la vie est changement. Tout contact avec la vie est source d’expansion et d’élargissement.
(…)

Swami Prajnanpad ; Psychanalyse et sagesse orientale
Daniel Roumanoff aux Editions Accarias L'Originel