samedi 5 avril 2008

Pema Chödron - Le désir de changer est une agression envers nous même

Pema Chödron est moine bouddhiste, disciple du maître tibétain Chögram Trungpa. Elle délivre un enseignement d'une grande simplicité qui nous parle directement. Elle nous invite à dire "oui" à ce qui est, sans volonté de changer et toujours avec une très grande douceur, une amitié bienveillante avec soi même.

www.pemachodron.org


La méditation consiste à voir clairement le corps et l'esprit que nous avons, la situation domestique qui est la nôtre, le métier que nous exerçons et ceux qui font partie de notre vie. Elle consiste à voir comment nous réagissons à tout cela. Voir nos émotions et nos pensées simplement, ici et maintenant.

Il s'agit de ne pas essayer de les chasser, ni de devenir meilleur que nous ne le sommes, mais bien de voir clairement, avec précision et douceur. Tout au long de ce mois de méditation, nous travaillerons à cultiver la douceur, la précision innée et la capacité de nous débarrasser de notre étroitesse d'esprit, d'apprendre comment nous ouvrir à nos pensées et à nos émotions, à tous les gens que nous rencontrons dans notre monde, comment ouvrir nos coeurs et nos esprits.
Ce n'est pas un programme d'amélioration ; ce n'est pas une situation dans laquelle nous essayons d'être meilleur que nous ne le sommes maintenant. Si nous avons mauvais caractère et que nous sentons que nous nous faisons du mal à nous-même et que nous blessons les autres, nous pourrions penser qu'une semaine ou un mois de méditation assise suffirait pour chasser ce mauvais caractère - que nous deviendrons cet être doux que nous avons toujours désiré être ; et que nos lèvres blanches comme lis ne prononceront plus jamais de mots durs. Le désir de changer est, fondamentalement, une forme d'agression envers nous même. C'est une première difficulté.
L’autre problème c'est que, heureusement ou malheureusement, ce sont nos complexes qui contiennent notre richesse ; notre névrose et notre sagesse sont faites du même matériau ; si nous rejetons notre névrose, nous rejetons aussi notre sagesse.
Une personne très en colère déploie aussi beaucoup d'énergie, et c'est cette énergie qui la rend attirante ; c'est la raison pour laquelle on l'aime. Il ne faut pas essayer de se débarrasser de sa colère, mais plutôt de s'en faire une amie, de la voir clairement, avec précision et honnêteté et aussi avec douceur. Cela signifie ne pas se juger mauvais, mais aussi ne pas raffermir sa position : «C'est bien que je sois ainsi, c'est correct. Les autres sont insupportables et j'ai raison d'être constamment en colère contre eux".
La douceur implique de ne pas réprimer la colère mais aussi de ne pas lui donner libre cours. C'est quelque chose de beaucoup plus doux et beaucoup, plus franc encore. Ça suppose, après avoir reconnu complètement son sentiment de colère et pris conscience de qui l'on est et de ce que l'on fait, d'apprendre comment lâcher prise. Nous pouvons abandonner les habituels petits scénarios pitoyables qui accompagnent nos colères et commencer à voir clairement comment nous entretenons tout ce cirque.
Ainsi, qu'il s'agisse de colère, de convoitise, de jalousie, de peur ou de dépression - peu importe -, il ne faut pas essayer de nous en débarrasser mais au contraire entrer en amitié avec cela. Cela signifie arriver à le connaître à fond, avec une certaine douceur, et une fois que l'on en a fait complètement l'expérience, apprendre à lâcher prise.
La technique de méditation elle-même cultive la précision, la douceur et la capacité de lâcher prise - qualités innées en nous. Ce n'est pas quelque chose à acquérir, mais bien à mettre en valeur, à cultiver ou à redécouvrir en nous-même.

Pema Chödron - Entrer en amitié avec soi-même - Edition Pocket